PROGRAMME – 2023 – CONCERTS
STABAT MATER de Anton DVORAK
à la musique de Ola Gjeilo
accompagnés par Marie Dominique GACHET au piano.
avec en soliste Valérie Rossi, Valérie Dellong, Philippe Noncle et Yvan Bouguyon.
– Samedi 13 mai à 18h. – Eglise Saint Roch à GAP
– Dimanche 14 mai à 17 h – Église de Laragne
Alors qu’il est encore peu connu en dehors de son pays d’origine, le Stabat Mater va contribuer à faire connaître l’auteur sur la scène mondiale. L’œuvre est dédicacée à František Hušpauer, un ami d’enfance du musicien. Elle est sa première œuvre sacrée (à part une messe de jeunesse qu’il a détruite et une autre qui a été perdue)1 et est intimement liée à la tragédie familiale qui frappe Dvořák. Le 21 septembre 1875, sa fille nouveau-née Josefa meurt. En réaction à ce deuil, Dvořák compose une première version de l’œuvre entre le 19 février et le 7 mai 18762. Cette version est confiée à quatre solistes, un chœur et un piano. Dvořák met l’œuvre de côté sans aborder l’orchestration.Dvořák perd ses deux autres enfants à quelques semaines d’intervalle, sa fille Ruzena le 13 août et son fils ainé Otokar le 8 septembre 1877. C’est alors qu’il reprend le manuscrit abandonné l’année précédente. Il rajoute trois mouvements (les numéros 5, 6 et 7) et orchestre l’ensemble de l’œuvre entre octobre et le 13 novembre 1877.Le compositeur suit dans l’ensemble la version liturgique du Missel romain, mais s’en éloigne de temps en temps vers la fin pour suivre celle de la séquence du XIIIe siècle de Jacopo da Todi, qui traduisent plus spécifiquement sa propre douleur, suivant en cela une pratique fréquente au XIXe siècle3 :Dans le premier vers de la strophe 13, au lieu de la version liturgique (« Fac me tecum pie flere »), Dvořák prie non pas « pleurer pieusement avec toi », parce que ses pleurs sont bien réels et n’ont rien à voir avec de la piété ; mais pour que cette douleur soit véritablement associée à celle de la Vierge (« Fac me vere tecum flere, »). Dans la fin de la strophe 17, Dvorak s’éloigne du texte liturgique (« Fac me cruce inebriari Et cruore Filii ») en parlant de « cette croix » (au lieu de « de la croix ») et de « l’amour du fils » (au lieu du « sang de votre fils »), signature personnelle qui fait le parallèle entre la douleur de la Vierge et la sienne propre face à la mort de son enfant : « Cruce hac inebriari Ob amorem filii ». Il continue sa prière personnelle dans la strophe 18, en se disant dans le premier vers « brûlant et dévoré de flammes » (Inflammatus et accensus) au lieu de « craignant les flammes de l’enfer » (Flammis ne urar succensus). Enfin, dans la strophe 19, la version liturgique s’adresse au Christ pour lui demander au jour dernier la grâce d’être conduit par Marie à la palme des vainqueurs (« Christe, cum sit hinc exire, Da per Matrem me venire Ad palmam victoriae. »). Dvořák reprend la version du XIIIe siècle « Fac me cruce custodiri, Morte Christi praemuniri, Confoveri gratia », qui ne parle plus du jugement dernier mais de la vie qui lui reste à vivre dans la douleur : « Fais que je sois gardé par cette croix, fortifié par la mort du Christ, soutenu par la grâce ». Le compositeur a dépassé sa propre souffrance pour donner une œuvre empreinte d’émotion confiée plus aux voix qu’à l’orchestre, mais jaillissante et spontanée même dans l’affliction atteignant ainsi une grandeur universelle4. |